J'aime bien les inconnus

On est là tous, vivants, on essaie, humains si c'est possible; on est là, on se croise, se toise, se bouscule. J'ai les larmes aux yeux, ça risque de déborder d'un moment à l'autre, et vous ne voyez rien.

Je suis au milieu de vous. Je suis surement le "vous" de quelqu'un d'autre, au milieu de nous.
Je frôle des mains dans les transports en public, et souvent, ça me gêne, je retire la mienne comme si elle avait été salie, et dans ce même élan, j'ai déjà un peu honte de ma réaction.

Quelqu'un m'a sourit tout à l'heure. J'étais dans ma tête, tout au fond, alors je n'ai pas vu. C'est quand c'était tout juste fini que j'ai compris; la bouche déjà reprenait sa position neutre, le pétillement repartait derrière les yeux et j'en voulais encore parce que je voulais qu'on le vive à deux.
Les sourires gratuits, c'est pas tous les jours, alors je le voulais encore, celui-là, lui répondre, qu'on sourit ensemble.


J'ai fixé la jeune fille jusqu'à ce qu'elle me revienne et j'ai étiré mes lèvres, découvert mes dents et plissé mes jeunes pattes d'oie.
Il y a eu quelques secondes suspendues et enfin, elle m'a accompagné.

Il était 9h10, j'étais en retard et dans ses fossettes, j'ai laissé filer ma station.

Tant pis.

On est descendues ensemble, on a marché côte à côte, un instant, à la même cadence et c'est comme si on se connaissait. Et puis la foule l'a engloutie, ou m'a engloutie, nous a séparées.
Et si ça n'est plus elle, ça peut être n'importe qui, au hasard.



J'ai décidé de sourire à tous ceux dont je croiserai le regard, toute la journée. De là tout de suite à ce soir, jusqu'au bout.

C'était un lundi incroyable.

Encore.
J'en veux encore.

-maispastrop-