Pour Invalides changez à Opéra, et restez-y.

Aujourd'hui, je sais pas ce qui m'a pris, j'ai été fascinée par le siège du métro tout à coup.
Comme le wagon était désert, j'ai pu observer. J'aime bien faire ça, observer. Je n'avais jamais remarqué la courbe dessinée pour -j'imagine-adopter l'envie d'un déformé par du, de, des, par la vie. Le fauteuil, en soi, la courbe en tout cas, l'ergonomie de cette courbe est émouvante au plus haut point. Une cambrure qu'on réserverait à la mère de nos enfants, ou celle à qui on voudrait en faire, en gros. Là, tout à coup, le siège m'est apparu éminemment sensuel ce qui était plutôt bizarre comme sensation à Marcadet Poissonniers sur les coups de 20h.
Quelqu'un a réfléchi à ça, la manière dont mon dos aimerait se caler après 10 heures de dur labeur. Et il est payé pour.
Peut-être est-ce quelqu'un qui a travaillé dix heures aussi, dans un bureau, avec des gens auxquels ils sourit et avec qui il s'entend, par la force des choses et du temps, peut-être est-ce cette personne qui a décidé de la forme toute séduisante des fauteuils de cette ligne de métro.

Je suis persuadée d'une chose: celui qui a dessiné le fauteuil ne doit pas s'entendre des masses avec celui qui a décidé de l'imprimé et de la matière de ces fauteuils. Si c'est la même personne, j'entends. Si jamais il y en avait un responsable de l'imprimé et un autre responsable de la matière, ils doivent pas aller boire des coups avec celui responsable de la forme. Mais eux deux, ils vont très certainement faire la fermeture des bars ensemble; c'est d'ailleurs là bas qu'ils doivent décider de ce sur quoi, nous, pauvres mortels, allons poser nos fonds de culotte. Si tant est qu'il nous en reste. Des fonds de culotte. Et peut-être même qu'eux aussi s'asseyent sur leurs croisillons criards en faux velours pour se rendre à la prochaine réunion décidant de la tonalité de voix de la dame qui annonce les prochaines stations; une première fois comme si elle nous interrogeait, une seconde et dernière fois comme si, tout réflexion faite, elle nous sommait de descendre. Peut-être même qu'elle nous interpelle. Et qu'elle va pas tarder à nous engueuler. Nan mais sans rire, on dirait ma prof de seconde qui fait l'appel et devant un silence d'église réitère sa question alors qu'il n'y a rien à répondre sinon ma tête endormie. Parfois, quand la fille des enceintes du métro prononce ma station avec une intonation en point d'interrogation, j'ai comme le réflexe de lever la main en criant "présente" pour pas qu'on me fourgue des heures de colle.

Si tout ça:
la forme du fauteuil, ses imprimés, sa matière et l'inflexion de madame "Barbès Rochechouart?"- "Barbès Rochechouart!" sont le fruit d'un seul et même cerveau, je serai gré à quiconque qui le sait de ne pas me le dire. J'ai déjà connaissance de beaucoup trop de choses affligeantes comme ça.

-maispastrop-

1 commentaire:

Unknown a dit…

les imprimés des sièges de métro et de bus sont totalement incroyables. Conçu pour passer inaperçu. Car bien que laid si on les observe de près, ils restent finalement très discrets.