*sur le papier*

Je ne parle presque plus jamais de vous.
Vous tous, les gens, partout tout le temps. On peut pourtant pas vous rater, les pigeons, à côté, c’est de la rigolade.
Avant (avant quoi ?), je parlais de vous, je parlais à vous, beaucoup. C’était comme qui dirait essentiel, au niveau du quotidien, je veux dire.
Pour pas oublier, j’écrivais. Ce que je pensais, ce que je constatais, ce que je maudissais aussi, enfin, surtout. Ce que je maudissais par-dessus tout.
Alors -et je ne sais pas pourquoi- je vous ai délaissés ; vous êtes toujours là, mais moi un peu moins j’imagine.
Est ce que vous ne seriez pas les mêmes, à chaque fois ? avec d’autres costumes, d’autres passés, d’autres tirades, mais nés de la même plume, du même autour cynique. C’est pas vous la source intarissable, faut croire ; vous m’avez … lassée.
Les garçons sont tous les mêmes, on confond toutes les filles, un garçon et une fille ressemblent à n’importe quel garçon avec n’importe quelle fille.

C’est pas vrai.
Bien sur que c’est pas vrai.
C’est même, osons le dire, archi-faux.
Mais c’est bien ce que vous vous obstinez à vouloir faire croire. Alors un peu fatiguée de creuser vos clones de carapaces, je vous laisse croire que je crois, en effet, à votre identité unique, et je restreins mon cercle de feu à ceux qui ne confondent pas le jeu et la comédie.
Je continue de vous observer, je suis là, mais avec moins d’émoi, parce que je ne vous autorise plus à me bouleverser, et ainsi, je ne vous accorde aucune priorité sur le papier. Je continue de me fondre, avec vous, de fréquenter les lieux publics, ces copies conformes des lieux privés, qu’on leur préfère pourtant pour se regrouper, entre semblables, sans se fréquenter, sans se confronter.
C’est étrange cette manie de nous coller les uns aux autres et d’agir là comme si on était complètement seul.

« besoin que vous soyez pas loin mais me faites pas chier »

J’allais dans les cafés pour raconter les cafés, les clients de cafés, les serveurs de café, les cafés des cafés. Le raconter à qui, je m’en foutais pas mal. Mes promenades prenaient une tonalité particulière quand, tout à coup, je m’imaginais vous les dépeindre.

Vous n’êtes plus mon sujet. Je vais dans les cafés, toujours, oui, cet amour-là est intact, mais c’est plus pour parler de vous que j’use mes culottes sur le rotin en plastique au milieu des volutes bientôt interdites. Et c’est pourtant toujours l’endroit idéal, ces cafés, parce qu’en effet, vous y êtes et, chez moi, vous n’êtes pas là. L’envie d’écrire non plus.
Rendez-la moi maintenant qu’elle ne vous appartient plus. C’était un prêt.

Et puis, ho, ça va hein, moi aussi j’ai remarqué que ça fait quasiment une page ou 1893 caractères que je parle du fait que je ne parle plus du vous et que, par là même, je parle de vous.
Merci du scoop.
Bravo.

Les vieux peut-être. Continuent de me… donner envie de… les regarder encore. J’aime bien les vieux. Même les vieux cons. J’aime qu’ils soient vieux. J’aime qu’ils ne fassent plus semblant, parce qu’ils s’en contrefoutent, au fond. J’aime qu’ils aient de nombreuses heures de vol derrière eux et beaucoup de voyages à raconter, qu’ils aient connu de leurs yeux vu des époques mortes dont nous sommes, nous, bizarrement nostalgiques, incapables de reconstruire une nouvelle époque digne de ce nom. Ou indigne même, qu’importe.
J’aime qu’ils contiennent du temps mélangé à des médicaments contre le temps, et qui, pour le perdre chaque jour un peu plus, en connaissent la valeur.
Qu’ils sachent. Et qu’ils se taisent.
J’aime l’idée qu’ils voient en moi, pourtant persuadée d’être unique, une autre peut-être déjà morte. J’aime l’idée qu’ils s’en foutent. Et qu’ils se taisent.

Fermez un peu vos gueules.

-maispastrop-

1 commentaire:

Anonyme a dit…

C. a dit
Comment se taire !
D'où revenez vous ? Je n'en reviens pas d'une souffrance aussi intacte, aussi pure... Je vous lis et relis en me disant que peut être un jour vous saurez que je vous ai lu... si vous ne perdez pas le mot de passe !
Quel plaisir de passer cet après midi pluvieux entre vos maux... Cet après midi plus vieux entre vos mots...