Par la fenêtre

Au milieu de nulle part, je serais mieux n’importe où.

La journée a commencé comme toutes les autres, par le lever du soleil et mon corps qui refusait d’y croire ; encore un miracle, encore un tour de la terre, encore 24 heures à venir, encore une couette chaude de moi qui me propose de prendre mon temps pendant que tous s’affairent et usent leurs semelles sur les trottoirs encore mouillés des jets de la mairie de la ville. Je sens que ça s'active.

Une cité propre. Une capitale efficace. Un métro ponctuel. Des salariés dévoués. Des payes mirobolantes.

Quand je décide enfin de sortir un pied, puis l’autre, humer la température et émerger complètement, y’en a déjà qui déjeunent autour d’un débrief de la matinée et du dossier Dupont. Alors, pour m’excuser de mon hibernation pendant que tous, vous faites vivre le pays, - merci - je me dévoue - de rien - pour faire ce que le manque de temps vous empêche de faire : je regarde la ville.

Elle est là, fidèle, cracra et insolente.
La cour d’école me rappelle qu’il y a un âge auquel on crie à poumons ouverts quand la cloche sonne. A poumons salis, j’écris que ça me plait à crever. Je me souviens pas bien mais il me semble tout de même que, moi aussi, à la récré, je courrais comme une poule sans tête, je gueulais pour un rien, je vivais sans le savoir.
Il y a les camions remplis des légumes que j’achèterai tout à l’heure (parce qu’il faut en manger au moins une fois par jour) qui klaxonnent, et les piétons qui doigtdh’onneurent en retour.
Le chien du 210 a encore fait sur le trottoir, le patron du bazar menace encore de le faire piquer et la vielle folle (puisque c’est comme ça qu’il faut dire) s’en fout, elle chante Carmen. Si vous ne l’aimez pas, je l’aime.
Les effluves montent jusqu'à mon 6° étage, celles du chien, celles des pots d’échappement, celles des courgettes et celles de la solitude.
Quelle fraîcheur.
Cette ville m’enivre.
Tout a deux fois plus d’effet ici. Le réveil, la fatigue, la foule, la nuit, l’alcool. Parce que le cœur bat plus vite, alors le sang court plus fort et la vodka se presse pour draguer le cortex.
Grand bien m’en fasse.
Paris se met à mon diapason pendant que je lui donne le la. Elle et moi, c’est comme ça :

*Cul.
*Chemise.

Pour toujours, et pas comme quand on se le promet en amoureux transis dans le blanc des yeux alors que, en transit, la phrase à peine terminée on n’y croit déjà plus, on sait que ça périme, les grands sentiments ; non, pour toujours pour de vrai, je veux dire, je le sais, je le sens, elle, vous pourrez pas me l’enlever.
Toc.

Après que la rue m’ait rappelé à quel point certains trottoirs sont insurmontables et d’autres feux rouges éternels, je me sens… osons le dire, chanceuse. Je pourrais ne me vêtir que de ça, seulement ça, mon quadruple trèfle, mais tout le monde ne comprendrait pas. Et, c’est quand même essentiel de se faire comprendre si on veut un tant soit peu communiquer avec nos prochains. Je ne sais pas encore si c’est quelque chose de vraiment utile, communiquer, mais je crois pouvoir déjà dire que c’est mieux que de rester dans un trou auquel personne n’accède et de se prendre au jeu, se sentir génial, incompris, génialement incompris, alors que tout ce qu’il y a c’est qu’on a déconnecté. On a débranché la prise qui nous reliait à leurs volts.
Et être incompris d’absolument tout le monde quand on a des choses à dire à 6 milliards d'êtres humains, ça revient à (blanc)

J'ai tenu la porte à la voisine, j'ai dit bonjour à la boulangère, j'ai souri au propriétaire du lavomatic et j'ai pensé qu'on n'était certainement nombreux à faire les mêmes choses, au même moment. J'ai pensé qu'on était trop nombreux. Parce que je ne pourrai jamais tous vous rencontrer.
Ca m'a miné de penser ça.

Mais on m'a tenu la porte dans le métro, un jeune homme m'a souri et m'a laissé sa place et un gamin m'a regardé avec les yeux de l'amour.
Alors, ça va. Le temps passe comme ça, entre le oui et le non, je veille simplement à ce qu'il ne s'enlise pas dans le "mouais, bof".

Je mange pas tiède.
J'aime pas trop les 1/2 mesures.

-maispastrop-


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